Mary Pratt
"La réalité est première, le symbole suit. Je vois ces choses et, soudainement, elles deviennent des symboles de vie."
- Mary Pratt, 1985
Encouragée dès son jeune âge à développer ses talents artistiques, Mary Pratt trouve son expression dans le dessin et la peinture. Elle raffine ses talents durant ses études au Département d’arts visuels de l’Université Mount Allison de Sackville au Nouveau-Brunswick où elle reçoit son diplôme en 1961. Elle étudie auprès de l’artiste Alex Colville, qui influence le développement de son style et son choix subséquent du réalisme. Pratt déclare que ses souvenirs d’enfant liés à la lumière informent son vocabulaire visuel et influencent son travail.
En 1957, Pratt épouse un camarade étudiant en art Christopher Pratt qu’elle a rencontré à l’Université Mount Allison. En 1964, Pratt a quatre enfants et continue de peindre. Plusieurs événements se conjuguent alors qui entraînent un changement radical de son style artistique. Frustrée du manque du temps qu’elle peut consacrer à l’art, Pratt commence à chercher une nouvelle méthode de travail pour exprimer l’intensité des modes de perception rehaussés qui sont au centre de son expérience. Elle commence à expérimenter l’utilisation de la lumière pour transformer un instant banal en une scène théâtrale chargée de sens. Toutefois, elle découvre que la lumière change plus vite qu’elle ne peut peindre ou dessiner. Elle réagit à ce dilemme en utilisant un appareil photo pour " immobiliser " la lumière et le moment. L’image devient ainsi un témoignage d’une puissante expérience visuelle qu’elle peut plus tard interpréter dans ses tableaux. Avec cette méthodologie et ses enfants qui, en vieillissant, demandent moins de son temps, Pratt commence à travailler régulièrement dans son atelier.
Dans son travail des années 1970, Pratt aborde les objets quotidiens de la vie domestique des femmes. En les représentant en gras plan et en détail, elle les charge d’une signification symbolique plus vaste et d’un sentiment d’absurdité. Gelée de cassis rouge (1972) est typique de sa façon d’élever de banales activités ménagères au statut de rituel. La lumière joue sur le sujet pour dynamiser le banal et l’imprégner d’un nouveau sens. Ici, la gelée doit reposer pour prendre mais la scène est ténue et dérangeante. L’intensité du soleil de fin d’après-midi qui se reflète dans le liquide évoque alors d’autres fluides rouges comme le vin ou le sang. Cette célébration et cette remise en contexte du banal a mérité à Pratt une réputation nationale.
La peintre de la côte est du Canada unanimement acclamée, nommée compagnon de l’Ordre du Canada en 1996, s’est éteinte le 14 août 2018 à St. John’s, Terre-Neuve où elle vivait et pratiquait son art.