Le Prix Lacey et le Hamilton Artists Inc.

Catherine Blackburn, Narhî Wasagabiich, 2020. Projet d'installation du Cannon Project Wall, partie du National Billboard Exchange avec AKA artist-run et PAVED Arts. Image: Mashal Khan
En décembre 2019, le Hamilton Artists Inc. a été choisi comme lauréat de la première édition du Prix Lacey. Ce prix, décerné tous les deux ans, créé par le philanthrope canadien John Lacey en association avec le Musée des beaux-arts du Canada, reconnaît le rôle essentiel des centres d’artistes autogérés et autres petits organismes artistiques pour appuyer les artistes canadiens et favoriser les pratiques émergentes. Le Hamilton Artists Inc., surnommé « le Inc. », est en activité sur la rue James North à Hamilton depuis 1975, ce qui en fait l’un des centres d’artistes autogérés les plus anciens au pays. En 45 ans d’existence, il s’est imposé comme espace communautaire à la programmation audacieuse, engagé dans la création de possibilités pour les artistes. Fort de quelque 250 membres, le centre sans but lucratif favorise l’engagement et le discours critiques tout en appuyant l’art contemporain.
Alors, comment le Prix Lacey a-t-il permis au Inc. de poursuivre ses activités en cette année où chaque institution artistique a dû trouver des moyens de fonctionner malgré des portes closes? « Je crois qu’une bonne partie de la contribution du Prix Lacey a été de faire en sorte que nous puissions financer certains des projets que nous avions déjà mis en œuvre », explique la directrice de la programmation Abedar Kamgari. Le Inc. a commencé par de petites améliorations à ses installations, comme une signalétique accessible. Il a fait l’acquisition de ressources pour sa bibliothèque de lecture, avec également un agrandissement de sa section dévolue aux enfants.
En outre, le centre a amélioré ses pratiques de travail. Pour la première fois de sa longue histoire, le Inc. a mis en place un régime d’avantages sociaux pour le personnel. Il a aussi été en mesure de garantir plus d’heures aux employé.e.s à temps partiel, ce qui prend une importance particulière étant donné l’impact économique de la pandémie sur les organismes culturels.
Lorsque la galerie a été forcée de fermer en mars suite aux mesures de confinement, le Inc. a pu payer leurs honoraires aux treize artistes qui avaient vu leurs expositions reportées ou annulées. « Les contreparties financières versées aux artistes sont déjà tellement incertaines, et il y avait beaucoup d’inconnu pour les temps à venir », résume la directrice générale Julie Dring. « Nous savions que nous devions donner l’exemple pour d’autres organismes artistiques et respecter nos engagements financiers vis-à-vis des artistes. » Confronté à une forte baisse de ses revenus (dons en recul, annulation de la campagne de financement annuelle et pertes dans la location des espaces), le Inc. a pu, grâce au Prix Lacey, assurer ces paiements, ajoute Dring.
Le centre n’en a pas moins poursuivi ses activités, néanmoins, avec des programmes adaptés pour le Web. Un atelier épistolaire, une performance et une intervention de l’artiste Tee Kundu, par exemple, ont migré sur Zoom. Steacy Easton a présenté Wechsler 2 sur Instagram Live. En partenariat avec le Factory Media Centre, centre d’artistes autogéré en arts médiatiques de Hamilton également, le Inc. a organisé des ateliers de perfectionnement professionnel, par exemple des tutoriels sur la demande de subvention, la santé mentale ou encore les droits des locataires et travailleurs et travailleuses en période de COVID-19, entièrement en ligne. La présentation à Hamilton de la programmation de courts-métrages The Future, d’ImagineNATIVE, s’est muée en projection virtuelle avec une causerie d’artiste en direct de la réalisatrice Rebecca Thomassie. En lieu et place des événements prévus au centre dans le cadre de son projet Incoming! A project for refugee, newcomer and immigrant artists, le Inc. a créé un livre à colorier gratuit sur ces temps de pandémie avec des dessins commandés aux artistes participant au programme. « C’était une façon de soutenir financièrement les artistes tout en produisant quelque chose dont les enfants et les adultes pourraient bénéficier à la maison », explique Kamgari. Les initiatives du Inc. ont aussi pris la forme d’activités de rayonnement.
De plus, le Inc. donne la priorité à l’aide, sous forme de dons directs et d’autres ressources, au travail accompli par des organismes afro-canadiens locaux en matière d’antiracisme au sein de la collectivité, comme le Hamilton Centre for Civic Inclusion. « Nous avons tous et toutes l’obligation de défendre les droits de la personne dans l’ensemble des aspects de notre travail », dit Kamgari. « Nous menons cette démarche parce qu’elle doit l’être, ajoute Dring. Et ce doit être le cas pour tous les espaces d’art. »
Même si les portes du centre d’artistes autogéré resteront fermées au mieux jusqu’en novembre, le Hamilton Artists Inc. est pourtant bien ouvert, actif et attelé à la tâche.
En décembre 2019, le Musée des beaux-arts du Canada a annoncé que le Hamilton Artists Inc. était le premier lauréat du Prix Lacey biennal; les mises en candidature pour la seconde édition du Prix débuteront à l’été 2021. Partagez cet article et abonnez-vous à nos infolettres pour demeurer au courant des derniers articles, expositions, nouvelles et événements du Musée, et en apprendre plus sur l’art au Canada.