Michael Snow. Suivre le mouvement de la perception
Michael Snow, The Viewing of Six New Works (2012), MBAC
Peintre, sculpteur, musicien, cinéaste, à 84 ans, le Canadien Michael Snow surprend encore le monde de l’art. Parfois, il se surprend encore lui-même.
« D’une certaine façon, je n’étais pas sûr du résultat auquel j’allais parvenir », avoue Snow à propos de sa plus récente installation, Visionnement de six nouvelles œuvres, présentée au Musée d’art contemporain canadien (MACC) à Toronto jusqu’au 2 juin. « Mais je suis parvenu à quelque chose et je pense que c’est très bon. »
Voilà un euphémisme classique de cet artiste de renommée internationale, dont l’innovation la plus récente s’appuie sur la technologie de pointe pour créer une forme de casse-tête.
Visionnement de six nouvelles œuvres est une série de vidéos haute définition créées avec un logiciel de capture d’écran tactile qui a suivi et enregistré les mouvements des yeux de Snow alors que celui-ci feignait de suivre des images sur un mur.
Michael Snow, The Viewing of Six New Works (2012), MBAC
« Tout est basé sur une appréciation personnelle de quelque chose qui en fait n’est pas là, explique-t-il. Ce qui est là, c’est la trace de la perception. On voit des couleurs très pures, chacune se modifiant de différentes façons. Elles apparaissent, disparaissent, au gré d’un enregistrement des évolutions du regard que quelqu’un porterait à une peinture ou une photographie ou toute autre image accrochée à un mur. »
Chacune des six œuvres qui composent l’installation possède sa propre « voie de perception ».
« Par exemple, l’un des sujets est un carré, précise Snow. On commence par en suivre les contours, comme on découvre habituellement un objet. Puis, notre attention se porte peut-être sur le côté gauche, la partie supérieure, le côté droit. Puis notre regard va de l’un à l’autre pour observer plus en détail. »
« Michael Snow n’a jamais fini d’inventer », dit David Liss, directeur artistique et conservateur du MACC, qui a coorganisé la présentation de cette installation avec le Musée des beaux-arts du Canada (MBAC). « Qu’est-ce que la photographie, sinon la lumière et la forme ? L’œuvre de Michael en est composée. Nous regardons tous différemment les œuvres d’art, bien qu’il existe des théories sur notre façon de réagir aux images. Dans ce cas-ci, les formes se déplacent et changent sur le mur, suivant les mouvements de l’œil qui regarde les six nouvelles œuvres; mais ceux-ci sont les six nouvelles œuvres. Pour moi, c’est tout simplement du pur Michael Snow. Au-delà du caractère brillant de la chose, tant sur le plan conceptuel que physique, c’est aussi et avant tout une belle salle. »
Pour Liss, l’exposition a « beaucoup à voir avec la peinture et la photographie. Lors de l’inauguration, quelqu’un a dit qu’il s’agissait d’une forme de retour de Michael à la peinture. Voilà une appréciation qu’il est intéressant d’avoir en tête lorsqu’on regarde une vidéo. »
Michael Snow n’en est pas si sûr. Ou du moins, il n’en parle pas.
« J’ai toujours cette envie de créer et de voir des choses nouvelles, et j’aime l’idée d’ajouter à ce que j’ai fait auparavant. Mais je n’ai pas la moindre idée de ce que sera la suite. »